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LA Côte d’Ivoire decide la base militaire 43e BIMA

Enjeux et perspectives

Le 2 octobre 2023, la Côte d’Ivoire a annoncé la fermeture de la base militaire 43e BIMA, une décision qui marque un tournant dans la stratégie de défense du pays. Située à Bouaké, au centre du pays, cette base a été un pilier pour la présence militaire française en Afrique de l’Ouest, mais la fermeture de celle-ci s’inscrit dans un contexte géopolitique et diplomatique complexe. Elle soulève des questions sur l’avenir des relations entre la Côte d’Ivoire et la France, la réorganisation des forces armées ivoiriennes, et les conséquences pour la sécurité régionale.

 

Contexte historique et stratégique

 La base 43e BIMA a été créée en 1961, au moment où la Côte d’Ivoire, alors dirigée par le président Félix Houphouët-Boigny, entretenait des relations étroites avec la France, son ancienne puissance coloniale. Située dans le centre du pays, la base servait de lieu stratégique pour les forces armées françaises, en particulier dans le cadre de l’opération Licorne, déployée lors de la guerre civile ivoirienne au début des années 2000. Cette base a également joué un rôle clé pendant la crise politique qui a suivi la tentative de coup d’État en 2002, devenant un symbole de l’influence militaire française en Afrique de l’Ouest.

 

Le tournant géopolitique

 La fermeture de la base 43e BIMA intervient dans un contexte où la Côte d’Ivoire cherche à redéfinir sa relation avec la France et, plus largement, à renforcer sa souveraineté nationale. Ces dernières années, de nombreux pays africains, notamment ceux du Sahel, ont exprimé un désir croissant d’indépendance par rapport à l’influence militaire française. Les manifestations récurrentes contre la présence militaire étrangère, associées à un sentiment d’ingérence, ont alimenté ce phénomène.

L’annonce de la fermeture de la base militaire s’inscrit dans cette dynamique de réaffirmation de la souveraineté. Le président Alassane Ouattara a en effet expliqué que la Côte d’Ivoire souhaite désormais se concentrer sur le renforcement de ses propres capacités militaires, plutôt que de compter sur une présence étrangère permanente.

 

Une décision marquée par la diplomatie et la sécurité régionale

La décision de fermer la base 43e BIMA a été prise en consultation avec la France, mais elle intervient dans un contexte marqué par des tensions diplomatiques croissantes entre la France et certains pays africains. Cette annonce est perçue par certains observateurs comme un nouveau signe de la volonté de l’Afrique de réajuster ses relations avec les anciennes puissances coloniales.

Il est intéressant de noter que cette décision intervient après une série de retrait de troupes françaises de bases militaires en Afrique, comme au Mali et au Burkina Faso, où la France a été contrainte de revoir sa posture militaire en raison de l’hostilité croissante de ces pays à la présence française.

Néanmoins, la Côte d’Ivoire a tenu à souligner que cette fermeture n’impliquait pas un changement radical de ses relations avec la France, mais qu’elle visait à redéfinir les modalités de coopération militaire dans le cadre de partenariats stratégiques renouvelés. La Côte d’Ivoire pourrait notamment renforcer ses relations avec l’ONU, l’Union africaine ou encore d’autres partenaires internationaux pour assurer sa sécurité.

 

 

Répercussions sur l’armée ivoirienne et la réorganisation des forces armées

 

La fermeture de la base 43e BIMA impose également une réorganisation significative des forces armées ivoiriennes. La Côte d’Ivoire devra investir davantage dans ses infrastructures militaires et ses capacités d’intervention, notamment en matière de formation, de logistique et de matériel. L’armée ivoirienne devra s’adapter à ce changement pour répondre aux défis sécuritaires régionaux, notamment face à la menace grandissante des groupes djihadistes dans la région du Sahel.

 

Dans ce cadre, le gouvernement ivoirien a annoncé qu’il lancerait un plan de modernisation de son armée, avec un accent particulier sur le renforcement des capacités locales. Ce projet pourrait inclure des partenariats militaires avec d’autres pays africains ou internationaux, ainsi qu’un renforcement des dispositifs de sécurité interne face à la menace des groupes armés qui se propagent au sein de la région sahélienne.

 

Les implications pour la sécurité régionale

 

La fermeture de la base 43e BIMA ne concerne pas seulement la Côte d’Ivoire, mais aussi la sécurité de la région dans son ensemble. L’armée ivoirienne joue un rôle central dans la stabilité de l’Afrique de l’Ouest, et toute réorganisation de ses capacités pourrait avoir des répercussions sur la gestion des crises dans la région, notamment au Mali, au Burkina Faso, ou encore au Niger, où des tensions politiques et militaires sont vives.

 

Le retrait des forces françaises de certaines bases a laissé un vide en matière de sécurité régionale, et la Côte d’Ivoire pourrait désormais être amenée à jouer un rôle plus actif dans les opérations multilatérales, en particulier dans le cadre de la CEDEAO (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest) et de l’UA.

 

Une décision qui ouvre de nouvelles perspectives

 La fermeture de la base 43e BIMA est un signal fort de la volonté de la Côte d’Ivoire de prendre en main son destin en matière de sécurité et de souveraineté militaire. Elle marque une étape importante dans la réorganisation des forces armées ivoiriennes et dans le redéploiement de son rôle au sein de la région. Si cette décision pourrait créer des défis immédiats en matière de transition sécuritaire, elle ouvre également des perspectives nouvelles pour une Afrique plus indépendante sur le plan militaire et plus déterminée à façonner son avenir sans une dépendance excessive à l’égard des puissances étrangères.

Il faudra néanmoins surveiller de près la mise en œuvre de cette décision et la manière dont la Côte d’Ivoire saura relever les défis sécuritaires qui en découleront, tout en consolidant sa position diplomatique et stratégique en Afrique de l’Ouest.

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